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Libertés fondamentales - droits de l'homme
Port de la burqa : validation et publication de la loi
Mots-clefs : Liberté d'opinion et de religion, Principe de liberté, Finalité de la loi, Atteinte à la personne, Dissimulation, Interdiction, Espace public
La loi interdisant la dissimulation du visage dans l'espace public est publiée au Journal officiel du 12 octobre 2010, après sa validation par le Conseil constitutionnel par une décision du 7 octobre.
Saisi par le président de l'Assemblée nationale et celui du Sénat, qui ne formulaient aucun grief particulier à l'encontre du texte, définitivement adopté le 14 septembre dernier (v. « Le Parlement vote l’interdiction générale de dissimuler son visage sur l’espace public », Dalloz Actu Étudiant 22 sept. 2010), le Conseil constitutionnel a été amené à apprécier l'équilibre choisi par le législateur entre :
– d'une part, les libertés de conscience, religieuse, d'expression, d'aller et venir et le respect de la vie privée ;
– et, d'autre part, la laïcité, la sauvegarde de la dignité de la personne humaine, l'égalité homme-femme, la sécurité publique et l'ordre public « immatériel » (v. Cah. Cons. const. n° 30).
Dans sa décision n° 2010-613-DC du 7 octobre 2010, le Conseil ne se réfère ni à la liberté d'expression ni au respect de la vie privée ni à la sauvegarde de la dignité humaine ni au principe de laïcité, mais aux articles 4 (principe de liberté), 5 (finalité de la loi) et 10 (libertés d'opinion et de religion) de la Déclaration de 1789 ainsi qu'à l'alinéa 3 du préambule de la Constitution de 1946 (égalité des droits entre les hommes et les femmes) et à la sauvegarde de l'ordre public.
Recherchant l'intention du législateur, il relève que les articles 1er (interdiction générale de dissimulation du visage) et 2 (définition de l'espace public et limites à l'interdiction) de la loi ont pour objet de répondre à l'apparition de pratiques, jusqu'alors exceptionnelles, consistant à dissimuler son visage dans l'espace public, le législateur ayant notamment estimé que celles-ci pouvaient constituer un danger pour la sécurité publique et méconnaissaient les exigences minimales de la vie en société. Le Conseil estime que le législateur a « complété et généralisé des règles jusque-là réservées à des situations ponctuelles à des fins de protection de l'ordre public » (consid. 4) et qu'« eu égard aux objectifs qu'il s'est assignés et compte tenu de la peine instituée en cas de méconnaissance de la règle fixée par lui » (contravention de 2e classe et/ou obligation d'effectuer un stage de citoyenneté), lesdites dispositions « assurent, entre la sauvegarde de l'ordre public et la garantie des droits constitutionnellement protégés, une conciliation qui n'est pas manifestement disproportionnée » (consid. 5).
Une réserve d'interprétation est cependant émise, le Conseil précisant : « toutefois, l'interdiction de dissimuler son visage dans l'espace public ne saurait, sans porter une atteinte excessive à l'article 10 de la Déclaration de 1789, restreindre l'exercice de la liberté religieuse dans les lieux de culte ouverts au public » (ibid.). Les articles 1er à 3 de la loi sont donc validés sous cette réserve, de même que les articles suivants (art. 4 créant le délit de dissimulation forcée du visage, art. 5 à 7 relatifs à son entrée en vigueur).
Cons. const., 7 oct. 2010, décis. n° 2010-613 DC, loi interdisant la dissimulation du visage dans l'espace public
Références
■ Loi n°2010-1192 du 11 octobre 2010 interdisant la dissimulation du visage dans l’espace public
Nul ne peut, dans l’espace public, porter une tenue destinée à dissimuler son visage.
Article 2
I. – Pour l’application de l’article 1er, l’espace public est constitué des voies publiques ainsi que des lieux ouverts au public ou affectés à un service public.
II. – L’interdiction prévue à l’article 1er ne s’applique pas si la tenue est prescrite ou autorisée par des dispositions législatives ou réglementaires, si elle est justifiée par des raisons de santé ou des motifs professionnels, ou si elle s’inscrit dans le cadre de pratiques sportives, de fêtes ou de manifestations artistiques ou traditionnelles.
Article 3
La méconnaissance de l’interdiction édictée à l’article 1er est punie de l’amende prévue pour les contraventions de la deuxième classe.
L’obligation d’accomplir le stage de citoyenneté mentionné au 8o de l’article 131-16 du code pénal peut être prononcée en même temps ou à la place de la peine d’amende.
Après la section 1 bis du chapitre V du titre II du livre II du code pénal, il est inséré une section 1 ter ainsi rédigée :
« Section 1 ter
« De la dissimulation forcée du visage
« Art. 225-4-10. − Le fait pour toute personne d’imposer à une ou plusieurs autres personnes de dissimuler leur visage par menace, violence, contrainte, abus d’autorité ou abus de pouvoir, en raison de leur sexe, est puni d’un an d’emprisonnement et de 30 000 € d’amende.
« Lorsque le fait est commis au préjudice d’un mineur, les peines sont portées à deux ans d’emprisonnement et à 60 000 € d’amende. »
Les articles1er à 3 entrent en vigueur à l’expiration d’un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi.
Article 6
La présente loi s’applique sur l’ensemble du territoire de la République.
Article 7
Le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur l’application de la présente loi dix-huit mois après sa promulgation. Ce rapport dresse un bilan de la mise en œuvre de la présente loi, des mesures d’accompagnement élaborées par les pouvoirs publics et des difficultés rencontrées.
La présente loi sera exécutée comme loi de l’État. »
■ Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août de 1789
« La liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui : ainsi, l'exercice des droits naturels de chaque homme n'a de bornes que celles qui assurent aux autres Membres de la Société la jouissance de ces mêmes droits. Ces bornes ne peuvent être déterminées que par la Loi. »
« La Loi n'a le droit de défendre que les actions nuisibles à la Société. Tout ce qui n'est pas défendu par la Loi ne peut être empêché, et nul ne peut être contraint à faire ce qu'elle n'ordonne pas. »
« Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l'ordre public établi par la Loi. »
■ Alinéa 3 du préambule de la Constitution de 1946
« La loi garantit à la femme, dans tous les domaines, des droits égaux à ceux de l'homme. »
« Infraction la moins grave après les crimes et les délits, sanctionnée de peines contraventionnelles.
Ces peines sont l’amende, certaines peines privatives ou restrictives de droits, des peines complémentaires, et la sanction-réparation. Le taux maximum de l’amende est de 3 000 euros pour les personnes physiques, et du quintuple de ce montant pour les personnes morales. »
« Peine correctionnelle consistant, pour le condamné, à accomplir un stage dont l’objet est de lui rappeler les valeurs républicaines de tolérance et de respect de la dignité humaine sur lesquelles est fondée la société, de lui faire prendre conscience de sa responsabilité pénale et civile et des devoirs qu’implique la vie en société, tout en visant à favoriser son insertion sociale. Ce stage doit être accepté par le prévenu. Il peut être financé par lui, si la juridiction le précise, pour un coût qui ne peut excéder le montant de l’amende contraventionnelle de 3e classe. »
Lexique des termes juridiques 2011, 18e éd., Dalloz, 2010.
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