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Procédure pénale
Comparution et recevabilité des conclusions
Mots-clefs : Juridiction de proximité, Audience de jugement (Comparution, non), Conclusions (dépôt, régularité, non)
Les écrits adressés à la juridiction de proximité ne valent pas conclusions régulièrement déposées au sens de l’article 459 du Code de procédure pénale, faute pour la partie d’avoir comparu à l’audience ou d’y avoir été représentée.
En l’espèce, Mme X…, poursuivie devant la juridiction de proximité pour ne pas avoir respecté l’arrêt imposé par un feu rouge, avait demandé au ministère public la communication des pièces du dossier. Sans réponse du parquet, elle avait saisi le président de la juridiction et soulevé un incident de procédure pour non-respect du principe du contradictoire. À l’audience de jugement, elle avait été reconnue coupable et condamnée à une amende de 150 euros. On précisera qu’elle n’avait pas comparu et ne s’était pas fait représenter.
Devant la Cour de cassation, la prévenue invoquait notamment une violation des articles 411 (permettant le jugement du prévenu en son absence), 459, alinéa 3 (relatif aux conditions de dépôt de conclusions par les parties) du Code de procédure pénale, et 6, § 1, de la Convention EDH (garantissant le droit à un procès équitable). Elle prétendait que les écritures qu’elle avait déposées devant la juridiction de proximité valaient conclusions au sens de l’article 459 du Code de procédure pénale, et qu’en l’absence de réponse du ministère public, le principe du contradictoire avait été méconnu. La chambre criminelle rejette son pourvoi, estimant que « la prévenue ne peut se faire grief d'une insuffisance ou d'un défaut de réponse à conclusions, dès lors que les écrits qu'elle aurait adressés à la juridiction ne sauraient valoir conclusions régulièrement déposées au sens de l'article 459 dudit code, faute pour elle d'avoir comparu à l'audience ou d'y avoir été représentée ».
L’article 459 du Code de procédure pénale relatif au jugement des délits prévoit que « le prévenu, les autres parties et leurs avocats peuvent déposer des conclusions » (al. 1er). Il précise que « ces conclusions sont visées par le président et le greffier », lequel mentionne ce dépôt aux notes d’audience (al. 2) et, surtout, en ce qui nous concerne ici, que « le tribunal […] est tenu de répondre aux conclusions ainsi régulièrement déposées » en joignant au fond les incidents et exceptions dont il est saisi et en statuant par un seul et même jugement prononçant sur l’exception puis sur le fond.
La présente solution entérine un récent revirement du 16 juin 2011, qui était revenu à une interprétation stricte de l’article 459 de manière à endiguer une pratique permise par un arrêt de 1987 et consistant, pour les prévenus, à contester les infractions relevées à leur encontre par le biais d’une lettre adressée à la juridiction correctionnelle (ou de proximité), sans comparaître à l’audience. Désormais, le message adressé aux prévenus est donc clair : la régularité des conclusions déposées devant la juridiction est subordonnée à la présence des intéressés à l’audience de jugement.
Crim. 22 nov. 2011, F-P+B, n° 11-82.826
Références
■ Contradictoire (Principe du)
[Procédure (principes généraux)]
« Principe essentiel, bien que non formulé pendant longtemps par la loi, commandant toutes les procédures.
Il implique la liberté pour chacune des parties de faire connaître tout ce qui est nécessaire au succès de sa demande ou de sa défense. Il impose que toute démarche, toute présentation au juge d’une pièce, d’un document, d’une preuve par l’adversaire soit portée à la connaissance de l’autre partie et librement discutée à l’audience. Le respect du principe du contradictoire est la condition indispensable de la liberté de la défense. Le juge doit en toutes circonstances observer et faire observer le principe de la contradiction; il ne peut retenir dans sa décision que les explications qu’il a recueillies contradictoirement et ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu’il a relevés d’office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations. »
Source : Lexique des termes juridiques 2012, 19e éd., Dalloz, 2011.
■ Crim. 16 juin 2011, n° 10-87.568, D. 2011. 1688 ; ibid. 2231, obs. Pradel ; RSC 2011. 664, obs. Danet, Dalloz Actu Étudiant 5 juill. 2011.
■ Crim. 27 mai 1987, no 86-93.921, Bull. crim. no 223.
■ Code de procédure pénale
« Quelle que soit la peine encourue, le prévenu peut, par lettre adressée au président du tribunal et qui sera jointe au dossier de la procédure, demander à être jugé en son absence en étant représenté au cours de l'audience par son avocat ou par un avocat commis d'office. Ces dispositions sont applicables quelles que soient les conditions dans lesquelles le prévenu a été cité.
L'avocat du prévenu, qui peut intervenir au cours des débats, est entendu dans sa plaidoirie et le prévenu est alors jugé contradictoirement.
Si le tribunal estime nécessaire la comparution personnelle du prévenu, il peut renvoyer l'affaire à une audience ultérieure en ordonnant cette comparution. Le procureur de la République procède alors à une nouvelle citation du prévenu.
Le prévenu qui ne répondrait pas à cette nouvelle citation peut être jugé contradictoirement si son avocat est présent et entendu. Le tribunal peut également, le cas échéant, après avoir entendu les observations de l'avocat, renvoyer à nouveau l'affaire en faisant application des dispositions de l'article 410-1.
Lorsque l'avocat du prévenu qui a demandé à ce qu'il soit fait application des dispositions du présent article n'est pas présent au cours de l'audience, le prévenu est, sauf renvoi de l'affaire, jugé par jugement contradictoire à signifier. »
« Le prévenu, les autres parties et leurs avocats peuvent déposer des conclusions.
Ces conclusions sont visées par le président et le greffier ; ce dernier mentionne ce dépôt aux notes d'audience.
Le tribunal qui est tenu de répondre aux conclusions ainsi régulièrement déposées doit joindre au fond les incidents et exceptions dont il est saisi, et y statuer par un seul et même jugement en se prononçant en premier lieu sur l'exception et ensuite sur le fond.
Il ne peut en être autrement qu'au cas d'impossibilité absolue, ou encore lorsqu'une décision immédiate sur l'incident ou sur l'exception est commandée par une disposition qui touche à l'ordre public. »
■ Article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme - Droit à un procès équitable
« 1. Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle. Le jugement doit être rendu publiquement, mais l'accès de la salle d'audience peut être interdit à la presse et au public pendant la totalité ou une partie du procès dans l'intérêt de la moralité, de l'ordre public ou de la sécurité nationale dans une société démocratique, lorsque les intérêts des mineurs ou la protection de la vie privée des parties au procès l'exigent, ou dans la mesure jugée strictement nécessaire par le tribunal, lorsque dans des circonstances spéciales la publicité serait de nature à porter atteinte aux intérêts de la justice.
2. Toute personne accusée d'une infraction est présumée innocente jusqu'à ce que sa culpabilité ait été légalement établie.
3. Tout accusé a droit notamment à :
a) être informé, dans le plus court délai, dans une langue qu'il comprend et d'une manière détaillée, de la nature et de la cause de l'accusation portée contre lui ;
b) disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense ;
c) se défendre lui-même ou avoir l'assistance d'un défenseur de son choix et, s'il n'a pas les moyens de rémunérer un défenseur, pouvoir être assisté gratuitement par un avocat d'office, lorsque les intérêts de la justice l'exigent ;
d) interroger ou faire interroger les témoins à charge et obtenir la convocation et l'interrogation des témoins à décharge dans les mêmes conditions que les témoins à charge ;
e) se faire assister gratuitement d'un interprète, s'il ne comprend pas ou ne parle pas la langue employée à l'audience. »
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