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[ 25 janvier 2023 ] Imprimer

Droit des obligations

Demande de prêt conforme aux caractéristiques définies dans la promesse de vente : les acquéreurs ne peuvent être contraints à accepter toute offre d’un montant inférieur

Dans une promesse de vente prévoyant une condition suspensive d’obtention d’un prêt, l’indication d’un montant maximal du prêt n'est pas de nature à contraindre l’acquéreur à accepter toute offre d'un montant inférieur. En cas de refus par l’acquéreur, la défaillance de la condition suspensive, qui ne lui est pas imputable, justifie la caducité de la promesse.

Civ. 3e, 14 déc. 2022, n° 21-24.539 B

Un vendeur avait conclu, par l’intermédiaire d’une agence immobilière, une promesse de vente d'un appartement. La promesse contenait une condition suspensive d'obtention d'un prêt par les acquéreurs d'un montant maximum fixé, remboursable sur vingt-cinq ans au taux de 2 % l'an hors assurance. Deux mois après la signature de la promesse, après avoir reçu une offre de prêt d’un montant inférieur de la part de la banque, malgré la conformité de leur demande aux caractéristiques de la promesse de vente, les acquéreurs avaient notifié au vendeur leur renonciation à cette acquisition. Assignés en paiement de sa commission par l'agence immobilière, ils ont appelé en intervention forcée le vendeur, la société mandatée pour l'obtention d'un prêt, ainsi que la société civile professionnelle du notaire ayant reçu la promesse de vente, afin d'obtenir la restitution par le vendeur de la somme versée au titre de l'indemnité d'immobilisation et séquestrée entre les mains du notaire. Le vendeur avait, quant à lui, reconventionnellement demandé la condamnation des acquéreurs à lui verser une certaine somme au titre de l’indemnité d’immobilisation stipulée dans la promesse. La cour d’appel de Paris rejeta la demande du vendeur et déclara la promesse de vente caduque, au motif que la défaillance de la condition suspensive n’était pas imputable aux acquéreurs.

Devant la Cour de cassation, le vendeur soutenait que la promesse de vente ayant prévu un montant maximal du prêt il devait s’en déduire que les acquéreurs étaient tenus d’accepter toute offre d'un montant inférieur, comme celle en l’espèce proposée. La Haute juridiction approuve le raisonnement de la cour d’appel et rejette le pourvoi. Elle retient que la cour d'appel avait relevé que les acquéreurs avaient fait une demande de prêt conforme aux caractéristiques définies dans la promesse de vente, pour un montant maximal défini, qui leur avait été refusé par la banque qui n'avait consenti à leur accorder qu'un prêt d’un montant inférieur. La cour d'appel a alors retenu à bon droit que l'indication, dans la promesse, d'un montant maximal du prêt n'était pas de nature à contraindre les acquéreurs à accepter toute offre d'un montant inférieur et en a exactement déduit que la défaillance de la condition n'étant pas imputable aux acquéreurs, la promesse était devenue caduque.

Ainsi, alors que la condition suspensive est considérée comme réalisée lorsque l’acquéreur a de lui-même sollicité l’octroi d’un prêt pour un montant moindre à celui stipulé dans la promesse de vente (Civ. 3e, 14 janv. 2021, n° 20-11.224), il en va différemment lorsque ce dernier a formulé une demande de prêt conforme aux conditions de prix prévues par la promesse de vente, à laquelle la banque a refusé d’accéder. Sa liberté contractuelle de refuser l’offre d’un montant inférieur à celui qu’il estime nécessaire à l’acquisition du bien et stipulé dans la promesse oblige à constater dans ce cas la défaillance de la condition suspensive, laquelle ne lui est imputable. Ainsi, en l’espèce, la défaillance de la condition suspensive d’obtention d’un prêt ne pouvait être imputée aux acquéreurs ayant fait une demande de prêt conforme aux caractéristiques définies dans la promesse de vente, pour un montant maximal défini refusé par la banque, qui n’avait consenti à leur accorder qu'un prêt d’un montant inférieur. Partant, la promesse était bien devenue caduque.

Références :

■ Civ. 3e, 14 janv. 2021, n° 20-11.224 B DAE, 5 févr. 2021, note M. Hervieu  ; D. 2021. 134 ; ibid. 2022. 310, obs. R. Boffa et M. Mekki ; AJDI 2021. 624, obs. F. Cohet ; RTD civ. 2021. 408, obs. H. Barbier.

 

Auteur :Merryl Hervieu


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