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[ 29 novembre 2010 ] Imprimer

Droit de la famille

Interdiction du mariage gay : renvoi d'une QPC

Mots-clefs : Mariage, Homosexuels, Interdiction, Question prioritaire de constitutionnalité (renvoi), Cour de cassation

Par un arrêt du 16 novembre 2010, la Cour de cassation décide de renvoyer au Conseil constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) portant sur la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution des articles 75 et 144 du Code civil, qui interdisent le mariage entre personnes de même sexe.

Statuant sur les questions qui lui avaient été transmises le 25 août 2010 par le tribunal de grande instance de Reims, la première chambre civile estime que les conditions d'une saisine du Conseil constitutionnel sont réunies :

– les dispositions contestées sont applicables au litige.

– elles n'ont pas été déjà déclarées conformes à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel.

– et elles présentent un caractère nouveau.

C'est l'appréciation de cette dernière condition qui retient l'attention. Aux termes de l'article 61-1 de la Constitution, la question, pour être renvoyée au Conseil, doit présenter un caractère sérieux ou nouveau. En l'espèce, où l'on se trouvait dans le second cas de figure, la Cour de cassation prend soin de relever que « les questions posées font aujourd'hui l'objet d'un large débat dans la société, en raison, notamment, de l'évolution des mœurs et de la reconnaissance du mariage entre personnes de même sexe dans les législations de plusieurs pays étrangers ». Se fondant sur ces considérations, elle en conclut que les questions « présentent un caractère nouveau au sens que le Conseil constitutionnel donne à ce critère alternatif de saisine ».

Dans le prolongement de leur décision du 6 octobre 2010 concernant l'article 365 du Code civil (Cons. const. 6 oct. 2010, n° 2010/39 QPC), les sages de la rue Montpensier concluront probablement qu'il ne leur appartient pas de se prononcer sur ce sujet de société, et que la décision d'autoriser ou non le mariage homosexuel incombe au législateur.

Leur saisine par la Cour de cassation doit cependant être relevée :

– d'une part, elle est révélatrice d'une volonté grandissante de s'adresser au Conseil constitutionnel par le biais de la QPC ;

– d'autre part, elle est symboliquement forte : après le renvoi de la question portant sur la constitutionnalité de l'article 365 du Code civil, interdisant l'adoption au sein des couples homosexuels, voilà celui des articles 75 et 144 du même code, prohibant leur mariage.

Civ. 1re, QPC, 16 nov. 2010, F-P-D, n° 10-40.042

Références

■Mariage

« Union légitime de l’homme et de la femme résultant d’une déclaration reçue en forme solennelle par l’officier d’état civil qui a reçu auparavant les consentements des futurs, en vue de la création d’une famille et d’une aide mutuelle dans la traversée de l’existence. L’homme et la femme ne peuvent contracter mariage avant 18 ans révolus.

Ce terme désigne également l’acte juridique créateur de l’union et qui soumet celle-ci à des règles permettant aux époux de réaliser les buts de leur union. »

■ Question prioritaire de constitutionnalité

« À l’occasion d’une instance en cours (administrative, civile ou pénale), une partie peut soulever un moyen tiré de ce qu’une disposition législative applicable au litige ou à la procédure ou qui constitue le fondement des poursuites, porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit. Si la question n’est pas dépourvue de caractère sérieux et si cette disposition n’a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution par le Conseil constitutionnel, sauf changement de circonstances, la juridiction saisie doit statuer sans délai sur sa transmission au Conseil d’État ou à la Cour de cassation selon le cas. La haute juridiction saisie se prononce alors, dans un délai de trois mois, sur le renvoi au Conseil constitutionnel. Si ce dernier déclare la disposition non conforme à la Constitution, elle est abrogée. »

Lexique des termes juridiques 2011, 18e éd., Dalloz, 2010.

Cons. const. 6 oct. 2010, n° 2010/39 QPC, « Le cantonnement de l’adoption aux couples mariés jugé conforme à la Constitution », Dalloz Actu Étudiant 15 oct. 2010 ; D. 2010 AJ. 2293, obs. I. Gallmeister ; AJ fam. 2010. 487, obs. F. Chénedé ; ibid. 489, obs. C. Mécary.

■ Code civil

Article 75

« Le jour désigné par les parties, après le délai de publication, l'officier de l'état civil, à la mairie, en présence d'au moins deux témoins, ou de quatre au plus, parents ou non des parties, fera lecture aux futurs époux des articles 212, 213 (alinéas 1er et 2), 214 (alinéa 1er), 215 (alinéa 1er) et 220 du présent code. Il sera également fait lecture de l'article 371-1.

Toutefois, en cas d'empêchement grave, le procureur de la République du lieu du mariage pourra requérir l'officier de l'état civil de se transporter au domicile ou à la résidence de l'une des parties pour célébrer le mariage. En cas de péril imminent de mort de l'un des futurs époux, l'officier de l'état civil pourra s'y transporter avant toute réquisition ou autorisation du procureur de la République, auquel il devra ensuite, dans le plus bref délai, faire part de la nécessité de cette célébration hors de la maison commune.

Mention en sera faite dans l'acte de mariage.

L'officier de l'état civil interpellera les futurs époux, et, s'ils sont mineurs, leurs ascendants présents à la célébration et autorisant le mariage, d'avoir à déclarer s'il a été fait un contrat de mariage et, dans le cas d'affirmative, la date de ce contrat, ainsi que les nom et lieu de résidence du notaire qui l'aura reçu.

Si les pièces produites par l'un des futurs époux ne concordent point entre elles quant aux prénoms ou quant à l'orthographe des noms, il interpellera celui qu'elles concernent, et, s'il est mineur, ses plus proches ascendants présents à la célébration, d'avoir à déclarer que le défaut de concordance résulte d'une omission ou d'une erreur.

  Il recevra de chaque partie, l'une après l'autre, la déclaration qu'elles veulent se prendre pour mari et femme; il prononcera, au nom de la loi, qu'elles sont unies par le mariage et il en dressera acte sur-le-champ. »

Article 144

« L'homme et la femme ne peuvent contracter mariage avant dix-huit ans révolus. »

Article 365

« L'adoptant est seul investi à l'égard de l'adopté de tous les droits d'autorité parentale, inclus celui de consentir au mariage de l'adopté, à moins qu'il ne soit le conjoint du père ou de la mère de l'adopté; dans ce cas, l'adoptant a l'autorité parentale concurremment avec son conjoint, lequel en conserve seul l'exercice, sous réserve d'une déclaration conjointe avec l'adoptant devant le greffier en chef du tribunal de grande instance aux fins d'un exercice en commun de cette autorité.

Les droits d'autorité parentale sont exercés par le ou les adoptants dans les conditions prévues par le chapitre Ier du titre IX du présent livre.

Les règles de l'administration légale et de la tutelle des mineurs s'appliquent à l'adopté. »

Article 61-1 de la Constitution de 1958

« Lorsque, à l'occasion d'une instance en cours devant une juridiction, il est soutenu qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, le Conseil constitutionnel peut être saisi de cette question sur renvoi du Conseil d'État ou de la Cour de cassation qui se prononce dans un délai déterminé.

Une loi organique détermine les conditions d'application du présent article. »

 

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