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Projet de loi relatif à la prolongation de l’état d’urgence : avis favorable du Conseil d’État
Mots-clefs : Projet de loi, Avis, Conseil d’État, État d’urgence, Péril imminent, Prolongation, Terrorisme
Dans son avis rendu le 2 février 2016, le Conseil d’État a reconnu que la prolongation de l’état d’urgence était justifiée en raison de la persistance d’ « d’un péril imminent résultant d’atteintes graves à l’ordre public ».
Le Conseil d’État, en tant que conseiller juridique du Gouvernement, a été saisi d’un projet de loi ayant pour objet la prorogation de l’état d’urgence pour trois mois. La période de l’état d’urgence se terminerait ainsi le 26 mai 2016.
La persistance d’un péril imminent résultant d'atteintes graves à l'ordre public et l’efficacité des mesures prises depuis le 14 novembre
Le Conseil d’État constate l’existence de la persistance « d’un péril imminent résultant d'atteintes graves à l'ordre public » (L. n° 55-385 du 3 avr. 1955 relative à l’état d’urgence). En effet, « les liens entre le terrorisme intérieur et le terrorisme dirigé depuis l’étranger contre la France n'ont rien perdu de leur intensité ». Par ailleurs, de nombreux ressortissants français sont toujours présents en Syrie avec des groupes terroristes et peuvent revenir en France afin de commettre des actes de terrorisme. Enfin, les mesures de prévention d’attentat et de désorganisation des filières terroristes prises au titre de l’état d’urgence ont montré leur efficacité. « Depuis le 14 novembre 2015, 3 289 perquisitions administratives ont été menées. Elles ont permis la saisie de 560 armes, dont 42 armes de guerre. Elles ont conduit au placement en garde-à-vue de 341 personnes et donné lieu à l’ouverture de 571 procédures judiciaires. Par ailleurs, 407 assignations à résidence ont été prononcées, dont 303 sont toujours en vigueur, et plusieurs mosquées radicales et salles de prières ont été fermées. » (Compte rendu du Conseil des ministres, 3 février 2016).
L’effectivité du contrôle de proportionnalité des mesures
Le Conseil d’État a pris, en tant que juge des référés, un nombre significatif de mesures dans le cadre de l’état d’urgence. La procédure de référé-liberté (CJA, art. L. 521-2) permet au juge des référés d’apprécier la gravité de l'atteinte à une liberté fondamentale, de prendre en compte les limitations de portée générale à l'exercice de cette liberté pour permettre certaines interventions de la puissance publique jugées nécessaires. Ainsi, il a pu suspendre, par exemple, un arrêté d’assignation à résidence (CE, ord., 22 janv. 2016, n° 396116), ou encore demander au ministre de l’intérieur de revoir les modalités d’application d’un arrêté d’assignation à résidence en raison d’une atteinte grave et manifestement illégale au droit au respect de la vie familiale et à l'intérêt supérieur des enfants (CE, ord., 6 janv. 2016, n° 395622).
Par ailleurs, le Gouvernement a indiqué, dans l’exposé des motifs du projet de loi au Conseil d’État, avoir la volonté de renforcer « la proportionnalité des mesures à intervenir dans le cadre de la prorogation » de l’état d’urgence les trois prochains mois.
Il s’ensuit que :
- Le Gouvernement s’est engagé à ce que les assignations à résidence en cours le 26 février (date de la fin des trois premiers mois de l’état d’urgence) prennent fin à cette date. Toutefois, elles pourront être reprises pour les trois mois suivants mais seulement après un nouvel examen de dossiers. Le Conseil constitutionnel avait déjà par ailleurs précisé que « si le législateur prolonge (eait) l'état d'urgence par une nouvelle loi, les mesures d'assignation à résidence prises antérieurement ne peuvent (aient) être prolongées sans être renouvelées » (Cons. const. 22 déc. 2015, M. Cédric. D., n° 2015-527 QPC, § 13).
- L’objectif du Gouvernement est de réduire, pour les trois prochains mois, le nombre des mesures restrictives de liberté.
Ainsi, le Conseil d’État constate qu’il n’existe pas de déséquilibre entre « la sauvegarde des droits et libertés constitutionnellement garantis, d’une part, et la protection de l’ordre et de la sécurité publics, d’autre part ». Par ailleurs, les différents engagements internationaux sont compatibles avec l’état d’urgence et sa prorogation (V. Focus sur : État d’urgence et dérogation à la Convention européenne des droits de l’homme, Dalloz Actu Étudiant, 21 janv. 2016).
Toutefois, le Conseil d’État rappelle que l’état d’urgence doit demeurer temporaire (V. CE 27 janv. 2016, n° 396220). Il s’ensuit, que le renouvellement de l’état d’urgence ne peut être indéfini. La durée de prorogation de trois mois lui parait raisonnable. Néanmoins, il rappelle que la menace terroriste semble être une menace permanente. Il conviendrait alors de recourir à des « instruments pérennes ». Le conseiller juridique du Gouvernement insiste sur l’importance de la préparation de la fin de l’état d’urgence. Il prend pour exemple, le projet de loi renforçant la lutte contre le crime organisé et son financement, l’efficacité et les garanties de la procédure pénale, prochainement examiné par le Parlement, qui a pour objet de fournir de nouveaux instruments de lutte contre le terrorisme.
CE, avis, 2 février 2016, n° 391.124
Références
■ CE, ord., 27 janv. 2016, Ligue des droits de l’homme, n° 396220, Lebon ; AJDA 2016. 126 ; D. 2016. 259.
■ CE, ord., 22 janv. 2016, n° 396116, Lebon ; AJDA 2016. 127.
■ CE, ord., 6 janv. 2016, n° 395622, Dalloz Actu Étudiant, 11 janv. 2016.
■ Cons. const. 22 déc. 2015, M. Cédric. D., n° 2015-527 QPC, AJDA 2015. 2463.
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