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Droit de la famille
Interdiction confirmée pour la femme homosexuelle d’adopter l’enfant de sa compagne
Mots-clefs : Adoption simple, Autorité parentale, Conjoint, Mariage, QPC, Art. 365 C. civ.
L’article 365 du Code civil ne prévoit le partage de l’autorité parentale que dans le cas de l’adoption de l’enfant du conjoint, les conjoints étant entendus en l’état de la législation française comme des personnes unies par les liens du mariage.
Suite (et fin ?) de cette affaire qui avait donné lieu à la saisine du Conseil constitutionnel dans le cadre d’une QPC pour connaître de la conformité de l’article 365 du Code civil à la Constitution (Cons. const. 6 oct. 2010, n°2010-39 QPC).
Rappelons brièvement les faits et la procédure : deux femmes vivant ensemble ont chacune eu un enfant par insémination artificielle du même donneur. Souhaitant adopter chacune l’enfant de l’autre, elles avaient formé deux demandes d’adoption simple rejetées par les juges du fond en application de l’article 365 du Code civil. Dans le cadre du pourvoi en cassation ayant donné lieu à la décision ici commentée, le Conseil constitutionnel fut donc saisi. Déclarant que l’article 365 du Code civil n’était contraire à aucun droit et liberté que la Constitution garantit, notamment celui de mener une vie familiale normale (al. 10 Préambule), il confirma l’interprétation jurisprudentielle faite de cet article par la Cour de cassation à savoir que dans le cadre d’une adoption simple, l’exercice conjoint de l’autorité parentale n’est réservé qu’au conjoint de l’enfant adopté, cette notion de conjoint ne s’appliquant exclusivement qu’à « des personnes unies par les liens du mariage ». (Civ. 1re, 20 févr. 2007 ; Civ. 1re, 19 déc. 2007).
Cette déclaration de constitutionnalité a pour conséquence le rejet du pourvoi par les juges de la première chambre civile : « qu’ayant relevé d’une part que la mère de l'enfant perdrait son autorité parentale en cas d'adoption de son enfant alors qu'elle présente toute aptitude à exercer cette autorité et ne manifeste aucun rejet à son égard, d'autre part, que l'article 365 du code civil ne prévoit le partage de l'autorité parentale que dans le cas de l'adoption de l'enfant du conjoint, et qu'en l'état de la législation française, les conjoints sont des personnes unies par les liens du mariage, la cour d’appel, qui n’a contredit aucune des dispositions de la Convention européenne des droits de l’homme, et qui a pris en considération l’intérêt supérieur des enfants a légalement justifié sa décision ».
À une époque où les associations se délient aussi vite qu’elles peuvent se créer, les juges, en refusant l’adoption, garantissent ainsi la pérennité du droit parental du parent biologique sur son enfant.
Fixation définitive de l’état du droit sur ce point ? Il le semblerait, du moins en droit interne, puisque dans sa dernière décision en date du 28 janvier 2011 (Cons. const. 28 janv. 2011, n°2010-92 QPC) le Conseil constitutionnel déclarait que l’interdiction du mariage entre personnes du même sexe était conforme à la Constitution et ne contrevenait ni à la liberté du mariage ni au droit de mener une vie familiale normale ni au principe d’égalité devant la loi, mettant ainsi un frein à la possibilité de remplir dans un futur proche pour le partenaire de même sexe la condition de conjoint en tant que « personne unie par les liens du mariage ». Toutefois, l’espoir reste permis si l’on se tourne du côté de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH 31 août 2010, Gas et Dubois c. France) qui a admis la recevabilité d’une requête fondée sur la violation des articles 14 (principe de non-discrimination) et 8 (droits au respect de la vie privée et familiale), l’audience étant prévue courant avril prochain.
Civ. 1re, 9 mars 2011, n°10-10.385
Références
« Adoption laissant subsister des liens juridiques entre l'enfant et sa famille d'origine, tout en créant des liens de filiation entre l'adoptant et l'adopté. »
« Ensemble des prérogatives conférées par la loi aux père et mère sur la personne et les biens de leur enfant mineur et non émancipé. Chaque prérogative est constituée d'un droit (agir) et d'un devoir (d'agir dans l'intérêt du mineur). Les parents doivent ainsi protéger l'enfant dans sa sécurité, sa santé et sa moralité, assurer son éducation et permettre son développement, dans le respect dû à la personne. Jadis conférée au seul père, sous le nom de « puissance paternelle », l'autorité parentale est, en principe, exercée en commun par les père et mère.
■ Question prioritaire de constitutionnalité
« À l’occasion d’une instance en cours (administrative, civile ou pénale), une partie peut soulever un moyen tiré de ce qu’une disposition législative applicable au litige ou à la procédure ou qui constitue le fondement des poursuites, porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit. Si la question n’est pas dépourvue de caractère sérieux et si cette disposition n’a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution par le Conseil constitutionnel, sauf changement de circonstances, la juridiction saisie doit statuer sans délai sur sa transmission au Conseil d’État ou à la Cour de cassation selon le cas. La haute juridiction saisie se prononce alors, dans un délai de trois mois, sur le renvoi au Conseil constitutionnel. Si ce dernier déclare la disposition non conforme à la Constitution, elle est abrogée. »
Lexique des termes juridiques 2011, 18e éd., Dalloz, 2010.
« L'adoptant est seul investi à l'égard de l'adopté de tous les droits d'autorité parentale, inclus celui de consentir au mariage de l'adopté, à moins qu'il ne soit le conjoint du père ou de la mère de l'adopté ; dans ce cas, l'adoptant a l'autorité parentale concurremment avec son conjoint, lequel en conserve seul l'exercice, sous réserve d'une déclaration conjointe avec l'adoptant devant le greffier en chef du tribunal de grande instance aux fins d'un exercice en commun de cette autorité.
Les droits d'autorité parentale sont exercés par le ou les adoptants dans les conditions prévues par le chapitre Ier du titre IX du présent livre.
Les règles de l'administration légale et de la tutelle des mineurs s'appliquent à l'adopté. »
■ 10e alinéa du Préambule de la Constitution de 1946
« La Nation assure à l'individu et à la famille les conditions nécessaires à leur développement. »
■ Cons. const. 6 oct. 2010, n°2010-39 QPC, Dalloz Actu Étudiant 15 oct. 2010.
■ Civ. 1re, 20 févr. 2007, Bull. civ. I n° 71 ; GAJC, 12e éd., no 53-55 (II et III) ; D. 2007. 1047, note D. Vigneau (1re esp.) ; ibid. AJ. 721, obs. Delaporte-Carré (1re esp.) ; ibid. Chron. C. cass. 891, obs. Chauvin ; ibid. Pan. 1467, obs. Granet-Lambrechts ; JCP 2007. II. 10068, note Neirinck (1re esp.) ; Gaz. Pal. 2007. 480, avis Cavarroc ; Defrénois 2007. 791, obs. Massip ; AJ fam. 2007. 182, obs. Chénedé (1re esp.) ; Dr. fam. 2007, no 80, note Murat (2e esp.) ; RJPF 2007-5/32, note Mécary ; RLDC 2007/39, no 2570, note Le Boursicot ; RTD civ. 2007. 325, obs. Hauser.
■ Civ. 1re, 19 déc. 2007, Bull. civ. I, no 392 ; D. 2008. Pan. 1371, obs. Granet-Lambrechts ; ibid. 2008. 1028, note Mauger-Vielpeau ; ibid. Pan. 1786, obs. Lemouland et Vigneau ; JCP 2008. II. 10046, note Favier ; Gaz. Pal. 2008. 1. 307, et les obs. ; AJ fam. 2008. 75, obs. Chénedé ; Dr. fam. 2008, no 28, note Murat ; Defrénois 2008. 1119, obs. Massip ; RJPF 2008-3/28, obs. Garé ; RTD civ. 2008. 287, obs. Hauser.
■ Cons. const. 28 janv. 2011, n°2010-92 QPC, Dalloz Actu Étudiant 3 février 2011.
■ CEDH 31 août 2010, Gas et Dubois c. France.
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