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Le billet

[ 21 mars 2012 ] Imprimer

Rapport du Conseil d’État 2011 : de ci, de là…

Un nouveau rapport du Conseil d’État, intitulé Le Conseil d’État et la justice administrative en 2011 est arrivé dans les bacs, amis juristes ! Plutôt que d’en faire un compte rendu exhaustif et approfondi, dont on laissera le soin à nos collègues et parfois amis publicistes, par exemple notre colocataire de ce site, Frédéric Rolin, on s’en tiendra à l’écume des choses, et on privilégiera parfois, toute honte bue de privatiste sans scrupule, l’accessoire sur l’essentiel, en cinq très brèves chroniques sans prétentions…

■ Le temps de la justice administrative… Pas simple pour un profane qui souhaite en savoir plus sur la patience dont il devra faire preuve avant de voir son affaire jugée par une cour administrative d’appel ou le Conseil d’État. Si on s’en tient au second, en 2011, il fallait prendre son mal en patience, soit pendant 8 mois et 12 jours si on retient le délai prévisible moyen (à savoir le ratio entre les affaires en stock à la fin de l’année et celles jugées pendant l’année), soit pendant 17 mois et 15 jours si on retient le délai moyen constaté (soit la moyenne des délais de jugement constatés pour les affaires ordinaires effectivement jugées pendant l’année). Du simple au double en somme, étant entendu que ces deux délais ont augmenté en 2011…

■ Piano sur le principe de précaution et la responsabilité du fait des ondes ! Le Conseil d’État ne contribue pas à alimenter l’angoisse contemporaine à l’égard des risques gravissimes et irréversibles que sont supposés encourir les personnes qui habitent à proximité des antennes relais. D’une part, ils dénient aux maires tout pouvoir de réglementation en matière d’implantation dans sa commune de ces antennes de tous les dangers. D’autre part, il désactive le sulfureux principe de précaution, lequel ne peut pas être exploité par un maire pour reprendre d’un arrêté ce que le législateur lui a légalement refusé en cette matière (v. CE, Ass., 26 oct. 2011, Commune de Saint-Denis; CE, Ass., 26 oct. 2011, Commune des Pennes-Mirabeau ; CE, Ass., 26 oct. 2011, SFR).

■ Batailles de polochon : préparez les dortoirs ! Grâce à l’Europe et à sa manie de s’occuper de tout, nos chers bambins, que nous envoyons en colonie de vacances pour ne pas les abandonner sur des aires d’autoroutes déjà encombrées par nos pauvres amies les bêtes, vont désormais pouvoir mener d’homériques batailles de polochons, sans avoir à craindre l’intervention de leurs « monos ». Brevitatis causa, pour mettre le droit français en conformité avec le droit de l’Union, le Conseil a pris une décision par l’effet de laquelle les moniteurs de colonies de vacances ont désormais droit à un repos de quotidien de onze heures consécutives (v. CE 10 oct. 2011, Union syndicale Solidaires Isère).

■ Nos amies, les petites bêtes. Volant, provisoirement au moins, au secours des abeilles, le Conseil d’État a annulé la décision du ministre de l’Agriculture qui avait autorisé la mise sur le marché d’un insecticide aux effets supposés nocifs pour le petit peuple des ruches. Le ministre doit revoir sa copie car il avait retenu un compromis consistant à n’autoriser le « Cruiser » que pendant un an, alors qu’en vertu des règles du Code rural, soit l’autorisation d’un produit phytopharmaceutique est refusée, soit elle est accordée pour 10 ans. So à l’avenir, « Cruiser or not Cruiser » ? Suspense pour toutes les reines de France et de Navarre, et toutes leurs sujettes (v. CE 16 févr. 2011, Confédération paysanne et autres ; CE 3 oct. 2011, Union nationale de l’apiculture française).

■ La religion est toujours et partout l’opium du peuple… Et si ce bon vieux Karl avait raison ? En tous cas, les cinq célèbres décisions du Conseil d’État dans lesquelles celui-ci donne sa vision contemporaine de la loi du 9 décembre 1905 sur la séparation des Églises et de l’État, révèlent que la laïcité n’est plus tout à fait ce qu’elle était… Au nom de l’intérêt public local, des collectivités peuvent financer, directement ou indirectement, des travaux qui profitent, peu ou prou, à des associations cultuelles et à l’exercice de leur culte (v. CE 19 juill. 2011, Communes de Trélazé ; CE 19 juill. 2011, Fédération libre pensée et de l’action sociale du Rhône et M. P. ; CE 19 juill. 2011, Commune urbaine du Mans-Le Mans Métropole ; CE 19 juill. 2011, Commune de Montpellier ; CE 19 juill. 2011, Mme V). Et, dans un registre pas si éloigné, la cour administrative d’appel de Paris a décidé que les témoins de Jéhovah qui sont peut-être peu nombreux à croupir derrière les barreaux, ont droit, comme leurs frères catholiques, juifs, musulmans et protestants d’infortune, à l’assistance spirituelle d’un ministre du culte (CAA Paris, 27 juin 2011, Garde des Sceaux, ministre de la justice c. Association cultuelle des Témoins de Jéhovah de France).

 

 

Auteur :Denis Mazeaud


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