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Droit constitutionnel
Point sur l’article 1er de la Constitution de 1958
Mots-clefs : France, Indivisibilité, Laïcité, Démocratie, Égalité, Décentralisation, Non-discrimination, Constitution
Dalloz Actu Étudiant vous propose de faire un point sur l’article 1er de la Constitution de 1958 en donnant quelques pistes de réflexion sur un article énonçant de nombreux principes essentiels.
« La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle assure l'égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d'origine, de race ou de religion. Elle respecte toutes les croyances. Son organisation est décentralisée.
La loi favorise l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives, ainsi qu'aux responsabilités professionnelles et sociales. »
A l’origine l’alinéa 1er de l’article 1er de la Constitution se situait à l’alinéa 1er de l’article 2. Son déplacement résulte de la loi constitutionnelle du 4 août 1995, l’alinéa 2 a été ajouté lors de la réforme constitutionnelle de juillet 2008.
■ Les caractères de la République
Le caractère indivisible de la République
Le principe d’indivisibilité a pour objectif d’interdire toute forme de fédéralisme en France. En effet, l’État français répond aux critères de l’État unitaire déconcentré et décentralisé.
Le caractère laïque de la République
La laïcité de la République est une particularité française. Ce principe est issu de la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Églises et de l’État. Ainsi, la « République ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte » (L. 1905, art. 2). Il existe de nombreuses applications de ce principe dans de nombreux domaines, comme par exemple l’exposition de crèches de la Nativité dans les lieux publics (V. Dalloz Actu Étudiant, 19 oct. 2015), le financement d’activités non cultuelles d’associations cultuelles ou la participation au financement des édifices de culte (V. Dalloz Actu Étudiant, 1er sept. 2011), ou encore l’enseignement. Ainsi, le principe de laïcité de l’enseignement, également rappelé à l’alinéa 13 du Préambule de la Constitution de 1946 (« L'organisation de l'enseignement public gratuit et laïque à tous les degrés est un devoir de l'État »), n’exclut pas le principe de l’existence de l’enseignement privé. S’est également posée la question du port de signes religieux et notamment du voile à l’école que ce soit pour les élèves, et réglée par la loi (C. éduc., art. L. 141-5-1) ou les parents accompagnateurs de sorties scolaires (V. Dalloz Actu Étudiant, 18 juin 2015)…
Le caractère démocratique de la République
Si le caractère démocratique de la République est affirmé par l’article 1er de la Constitution, aucun renseignement n’est donné sur le type de démocratie. Toutefois, la loi constitutionnelle du 3 juin 1958 impose le suffrage universel et l’article 2 de la Constitution précise que le principe de la République est le « gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple ». L’article 3 fixe quant à lui les conditions de mise en œuvre du suffrage universel qui peut prendre la forme d’un suffrage universel direct (V. par exemple Const. 58, art. 6) ou indirect (V. Const. 58, art. 24, al. 4) mais toujours égal et secret.
Le caractère social de la République
L’idée de caractère social de la République est issue de la Constitution de 1946. Ce caractère renvoie pour l’essentiel aux droits sociaux garantis par le préambule de la Constitution de 1946 appartenant au préambule de la Constitution de 1958 (droit à la protection sociale, droit à l’emploi…).
Le caractère décentralisé de la République
La notion d’organisation décentralisée de la République a été ajoutée par la loi constitutionnelle du 28 mars 2003 à la demande de Jean-Pierre Raffarin alors Premier ministre de Jacques Chirac.
■ Le principe d’égalité devant la loi
L’idée de principe d’égalité devant la loi se retrouve également à l’article 6 de la Déclaration de 1789. Ce principe est un élément fondamental de l’organisation juridique et sociale de la France. Il a d’abord été affirmé comme un principe général du droit par le Conseil d’État et plus spécifiquement sous l’angle du principe d’égalité devant les charges publiques (DDH, art. 13 ; V. par ex. : CE 30 nov. 1923, Couitéas). Quant au Conseil constitutionnel, souvent saisi en vertu de ce principe, notamment pour les questions prioritaires de constitutionnalité, il se réfère le plus souvent à l’article 6 de la Déclaration de 1789 et non à l’article 1er de la Constitution de 1958. Il va déterminer si la loi est ou non discriminatoire. On retrouve le plus souvent un considérant de principe selon lequel : «le principe d'égalité ne s'oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général pourvu que, dans l'un et l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit» (V. par ex : Cons. const. 9 avr. 1996, n° 96-375 DC ; Cons. const. 28 mai 2010, Cts L., n° 2010-1 QPC). Il s’ensuit que l’égalité n’est ni l’unité ni l’uniformité.
Par ailleurs, le législateur ne peut opérer de distinction selon l'origine, la race ou la religion. La France ne reconnaît qu’un seul statut, celui de citoyen. Il s’ensuit par exemple que sont interdites « statistiques ethniques » (Cons. const. 15 nov. 2007, n° 2007-557 DC).
■ Le respect de toutes les croyances
La France doit respecter toutes les croyances. L’article 1er de la Constitution affirme la liberté de conscience et pose le principe qu’aucune discrimination ne peut avoir lieu en raison de la religion. Le respect des croyances ne signifie pas l’ignorance des croyances par la France. Ce principe rappelle celui énoncé à l’article 10 de la Déclaration de 1789 selon lequel : « Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, mêmes religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l'ordre public établi par la loi. »
■ L’organisation décentralisée de la République
Cette notion a été ajoutée par la loi constitutionnelle du 28 mars 2003, sous l’impulsion du Premier ministre de l’époque, Jean-Pierre Raffarin.
■ Le principe d’égalité entre les hommes et les femmes
Une première loi constitutionnelle de juillet 1999 avait modifié l’article 3 de la Constitution de 1958 en ajoutant un alinéa à cet article qui précisait que « La loi favorise l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et aux fonctions électives ». Cet ajout résultait de la volonté de légiférer en imposant des quotas par sexe, ce qui était, avant cette réforme, contraire à la Constitution (Cons. const. 14 janv. 1999, n° 98-407 DC). Cette révision ne s’appliquait qu’aux élections à des mandats et fonctions politiques. Ainsi, le Conseil constitutionnel avait refusé d’appliquer l’alinéa 4 de l’article 3 de la Constitution de 1958 s’agissant des élections professionnelles dans la magistrature (Cons. const. 19 juin 2001, n° 2001-445 DC). Il avait également déclaré contraire à la Constitution une disposition imposant le respect de proportions déterminées entre les femmes et les hommes au sein des conseils d'administration et de surveillance des sociétés privées et des entreprises du secteur public, au sein des comités d'entreprise, parmi les délégués du personnel, dans les listes de candidats aux conseils de prud'hommes et aux organismes paritaires de la fonction publique (Cons. const. 16 mars 2006, n° 2006-533 DC). La loi constitutionnelle de juillet 2008 a ajouté un second alinéa à l’article 1er de la Constitution et abrogé l’alinéa 4 de l’article 3.
Références
■ CE 30 nov. 1923, Couitéas, Lebon 789.
■ Cons. const. 9 avr. 1996, Loi portant diverses dispositions d'ordre économique et financier, n° 96-375 DC
■ Cons. const. 28 mai 2010, Cts L., n° 2010-1 QPC
■ Cons. const. 15 nov. 2007, Loi relative à la maîtrise de l'immigration, à l'intégration et à l'asile, n° 2007-557 DC.
■ Cons. const. 14 janv. 1999, Loi relative au mode d'élection des conseillers régionaux et des conseillers à l'Assemblée de Corse et au fonctionnement des Conseils régionaux, n° 98-407 DC.
■ Cons. const. 19 juin 2001, Loi organique relative au statut des magistrats et au Conseil supérieur de la magistrature, n° 2001-445 DC.
■ Cons. const. 16 mars 2006, Loi relative à l'égalité salariale entre les femmes et les hommes, n° 2006-533 DC.
Pour aller plus loin : Code constitutionnel et des droits fondamentaux 2016, Dalloz.
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