Actualité > À la une
À la une

Libertés fondamentales - droits de l'homme
Genre et sexe, une différence à dormir debout ?
Selon la cour administrative d’appel de Versailles, le dortoir attribué à un enfant en colonie de vacances est celui qui correspond à son sexe et non à son genre.
CAA Versailles, 24 juin 2025, n° 24VE02253
Un enfant mineur, né fille en 2010 sous le prénom d'Emma, a obtenu une modification de son prénom à l'état-civil pour devenir Eliot. Il est suivi au sein d'une consultation d'accompagnement des transidentités en tant que garçon transgenre. Lors d'un séjour aux sports d'hiver organisé par une commune, la mère de l'enfant a demandé que celui-ci soit placé dans un dortoir de garçons. La commune a refusé, l'enfant a dormi dans un dortoir de filles. La mère a alors saisi le juge administratif. Le tribunal administratif comme la cour administrative d’appel n'ont pas fait droit à sa demande.
La décision de placer un enfant transgenre dans un dortoir correspondant à son sexe de naissance, plutôt qu'à son genre, méconnaît-elle les dispositions de l’article R. 227-6 du code de l'action sociale et des familles et constitue-t-elle une discrimination ou une atteinte disproportionnée au respect de sa vie privée au sens de l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme ?
■ Absence de méconnaissance des dispositions de l'article R. 227-6 du code de l'action sociale et des familles (CASF)
Aux termes du premier alinéa de l'article R. 227-6 du CASF « Les accueils avec hébergement mentionnés à l'article R. 227-1 doivent être organisés de façon à permettre aux filles et aux garçons âgés de plus de six ans de dormir dans des lieux séparés (...) ».
La mère de l’enfant transgenre soutenait que les dispositions de cet article étaient méconnues car son enfant est de genre masculin, comme l’atteste son changement de prénom mentionné sur sa carte d'identité et, sa transition de genre prise en charge à l'hôpital. Elle affirme qu'aucune obligation légale n'imposait à la commune de placer son enfant dans une chambre pour filles.
Toutefois la cour administrative d’appel de Versailles écarte ce moyen. En effet, selon les juges d’appel, l’article R. 227-6 du CASF doit être compris « comme différenciant les enfants selon leur sexe et non selon leur genre et comme retenant une obligation de non-mixité lors des accueils avec hébergement pour les enfants de plus de six ans. » Or, il ressort des pièces du dossier, et notamment de son certificat de naissance ainsi que de sa carte nationale d'identité, que l'enfant de la requérante était de sexe féminin, quand bien même son prénom d'origine avait été remplacé par un prénom masculin.
■ Absence de méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales sur le droit au respect de la vie privée et familiale
Dans cette affaire, la commune a essayé de trouver des solutions pour traiter au mieux cette situation. Elle s’est renseignée afin de connaître la conduite à tenir, a mis en œuvre certaines actions qui n’ont finalement pu aboutir. Aucun élément de ce dossier ne permet d'établir que la décision de la commune aurait été constitutive d'une volonté de discrimination.
Ainsi, la décision d'hébergement de l’enfant transgenre Eliot « en chambre de filles, pour un séjour facultatif en montagne d'une durée d'une semaine, ne peut être regardée, dans les circonstances particulières de l'espèce, et compte tenu notamment des contraintes matérielles s'imposant à la commune ainsi que des démarches engagées par celle-ci pour y remédier, comme ayant porté au droit de cet enfant au respect de sa vie privée une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise, alors, au demeurant, qu'il n'est pas contesté que cet enfant avait été inscrit l'année précédente à un séjour de vacances où il avait été placé en hébergement avec des filles sans qu'il soit établi que cette situation ait été perçue comme une méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la Conv. EDH ».
La commune a ainsi tout mis en œuvre pour essayer de trouver une solution mais en raison de contraintes extérieures, elle n’a pu répondre à la demande de la mère de l’enfant.
Autres À la une
-
Droit des obligations
[ 1 juillet 2025 ]
Spoofing téléphonique : de la difficulté de prouver la négligence grave du client
-
Droit bancaire - droit du crédit
[ 30 juin 2025 ]
Administration légale et fonctionnement du compte bancaire d’un mineur : la banque doit demander l’accord des parents
-
Droit bancaire - droit du crédit
[ 27 juin 2025 ]
Responsabilité bancaire en cas de « fraude au président » : retour sur la condition d’anomalie apparente
-
Droit du travail - relations individuelles
[ 26 juin 2025 ]
Obligation de sécurité : l’employeur doit se renseigner !
-
Droit de la responsabilité civile
[ 25 juin 2025 ]
Responsabilité du fait des produits défectueux : interprétation du point de départ du délai de prescription à la lumière de la directive
- >> Toutes les actualités À la une